Une tartelette nommée désir
Ah, ces chères tartelettes amandines de Cyrano de Bergerac ! Une recette en alexandrins, pardi, ça se retient bien.
Mises en vers par Edmond Rostand, dans la bouche de Ragueneau, elles hantaient mon imaginaire culinaire depuis toujours. Faut dire que j’ai vécu un paquet d’années non loin de la rue natale de ce cher Edmond et que j’ai appris à lire dans le dit Cyrano (la pièce, pas l’ Histoire comique des États et Empires de la Lune découverte quelques années plus tard, une lecture chaudement recommandable d’ailleurs).
Celles que je vis pendant des années à la devanture des pâtisseries parisiennes jamais ne me donnèrent envie d’y croquer. Certainement à cause de la ridicule cerise rouge posée façon téton en plein milieu.
Seule la recette de Pascale rangée dans un coin de ma tête avait fait frétillé ce souvenir littéraire.
Réveillé un soir de décembre par un rouleau de pâte brisée sommeillant au fond du frigo à finir d’urgence, départ en train le lendemain oblige. Et accentué par un désir urgent de pâtisserie, aiguisé par une panne de four qui dura quelques semaines. Semaines durant lesquelles je rêvais de tartes, cakes, pains, gâteaux variés, puisque je ne pouvais pas les faire cuire (cherchez d’où vient parfois l’inspiration, la contrainte arrive souvent en tête de liste). Etonnant pour une non-pâtissière avouée.
Donc, l’envie de ces tartelettes me pris… Et là encore, fatalité, plus une goutte, une larme, un gramme de poudre d’amandes dans les tiroirs de la maison. La dernière avait fini sur un tournage pour le boulot, et la fermeture désespérante de Massis Bleu, fournisseur officiel de mes placards, n’avait pas permis le réassort. En revanche, un sachet de pralin -acheté suite à la bluffante dégustation d’une autre recette tournée, décidément !- me tomba au sens propre dans le saladier (l’avantage d’avoir des placards qui débordent, le voilà). Des amandes, des noisettes, du sucre, après tout, il y a de tout ceci dans une frangipane. Alors naquirent, sans poésie mais d’une grosse envie, ces tartelettes pralinées.
Détails d’importance : tout d’abord, le beurre demi-sel. Ses grains craquants relèvent agréablement la saveur pralinée pour une fois sans renfort de chocolat, et lui évitent de sombrer dans la mièvrerie. Ensuite, la délicate confiture de citrons, signée Sapidus, offerte par une main amie, qui fait merveille avec le pralin.
Tartelettes pralinées
Pour 5 tartelettes
1 rouleau de pâte brisée (honte à moi alors que je sais en faire, mais parfois être une femme libérée qui bosse c’est pas facile)
1 sachet de pralin (100 g)
1 oeuf
50 g de beurre demi-sel mou
3 cuillères à soupe de crème liquide
Pour garnir :
3 cuillères à soupe d’amandes effilées
3 cuillères à soupe de marmelade de citron (mais oui Cléa, fallait pas désespérer)
2 cuillères à soupe d’eau
Préchauffer le four à 180° (th.6).
Dérouler la pâte brisée, y découper 5 cercles et en garnir les moules (si nécessaire beurrés).
Garnir de papier sulfurisé, remplir de billes en terre, ou de légumes secs. Laisser cuire 10 min.
Pendant ce temps, préparer la crème. Mélanger le pralin, l’oeuf et la crème, puis ajouter le beurre en parcelles jusqu’à obtention d’une chouette crémouille.
Oter les lests des tartelettes et les laisser sécher encore 5 min au four.
Garnir ensuite de crème et laisser à nouveau cuire 15 min.
Faire fondre la marmelade de citron avec l’eau. Griller légèrement les amandes dans une poêle brûlante.
Démouler les tartelettes, les recouvrir d’une fine couche de glaçage et les parsemer d’amandes.
Ces tartelettes voyagent extrêmement bien en TGV sans effritement, ce qui n’est pas la moindre de leurs qualités.
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Espérons que 2008 me voit, enfin, fabriquer et déguster des tartelettes amandines, des vraies.
La semaine prochaine, si vous le voulez bien, nous ferons des voeux plus sérieux. Enfin, on essaiera.